Voici des timbres dont vous ne trouverez pas trace dans le catalogue Yvert & Tellier d’Italie.
Il s’agit des timbres d’Assurance postale que l’on trouve dans les catalogues italiens sous la dénomination « Francobolli assicurativi », autrement dit : timbres attestant le paiement de l’assurance contre la perte, ou l’endommagement, ou l’utilisation frauduleuse du produit confié au service postal.
Ce service était confié successivement à : « Le Assicurazioni d’Italia » (Les Assurances d’Italie) et à l’« Istituto Assic.[Assicurazioni] e Previd. [Previdenza] Postelegrafonici » (Institut Assurances et Prévoyance Postes et Télégraphe (Réf. Catalogue Sassone 2017 vol 1, p 354). Chaque timbre comportait deux sections, dont la partie de gauche était collée « Sur le registre » de l’administration et celle de droite « Sur le reçu » du client.
La rareté et la méconnaissance de ce produit surprenant mérite que l’on s’attarde sur l’essentiel de ses données techniques.
Établies par décret du 9 septembre 1926 signé du Ministre des Communications Costanzo Ciano (Le Ministère des Communications est institué le 30 avril 1924 en lieu et place de Ministère des Postes et Télégraphes), les premières neuf valeurs, monocolores (brun, rouge ou bleu), paraissent en 1926 (Fig. 1, et 2), hormis la plus petite valeur de 10 c. de la série, qui paraît en 1930. Elles sont imprimées et émises, conformément à la délégation donnée par l’État, par « Le Assicurazioni d’Italia ». C’est la raison pour laquelle l’intitulé de l’émetteur apparaît dans la section de gauche comme de droite. Les indications inscrites sur la section de gauche des figurines permettent de distinguer pour chacune un sous-type, le premier étant « Valable pour colis postaux et lettres recommandées », et le second étant « Valable pour colis postaux ordinaires pour l’intérieur ».
Légalement valables jusqu’au 31 décembre 1936, ces premières figurines de 1926-1930 seront remplacées en 1936 par huit nouvelles valeurs comportant elles aussi chacune deux sous-types, avec un nouveau visuel partiel, une nouvelle perforation et de nouvelles couleurs (vert, rouge, violet, orange, vermeil, bleu, Fig. 3, et 4). L’« Istituto Assic.[Assicurazioni] e Previd. [Previdenza] Postelegrafonici » ayant assumé directement l’exercice de ce service, c’est l’intitulé du nouvel émetteur qui apparaît maintenant dans les sections de gauche et de droite de ces nouvelles figurines. Elles sont imprimées par le Poligrafico dello Stato, autrement dit, l’Imprimerie Nationale des timbres-poste de Poste Italiane. Elles seront utilisées jusqu’en 1945, leur validité légale arrivant à échéance le 31 décembre 1947. Après cette date, le service continuera d’exister, mais sans apposition de timbres spéciaux. La taxe spéciale indiquée dans les figurines de gauche était perçue par les Bureaux de Poste qui collaient ces timbres, et elle était dévolue à l’Institut d’Assurance, qui de son côté se devait de rembourser à l’Administration des Postes les dédommagements effectués auparavant par elle aux utilisateurs lésés par la perte, l’endommagement, ou l’utilisation frauduleuse du produit confié au service postal. |
Un contexte historique particulier : L’illustration de ces timbres montre que le faisceau du licteur (symbole du régime fasciste de Mussolini) partage l’espace avec le symbole royal Italien, ce qui est une première sur un timbre-poste Italien. En effet, les timbres d’usage courant qui montraient le buste de Victor-Emmanuel III continuaient de reproduire des types antérieurs au fascisme, sur lesquels, soit, il n’y avait aucun symbole, soit, se trouvait la reproduction des “petites” armoiries” du Royaume d’Italie héritées de 1890. |
Or, en 1926, ces Timbres-poste d’Assurance postale initient la longue période pendant laquelle il y aura une alternance, que nous qualifierons de “savante”, des symboles fascistes et royaux. Elle est orchestrée par le gouvernement fasciste, et elle est l’expression d’une cohabitation compliquée des deux têtes du pouvoir, qui cache des sous-entendus, des tensions et naturellement aussi la complicité nécessaire entre des partenaires qui tout au long du Ventennio tantôt se complètent et tantôt s’ignorent quand ils ne s’excluent pas. Car, c’est là aussi un moyen de propagande que le gouvernement fasciste organise et manie de main de maître pour exprimer sa propre “vision” du moment de l’événement illustré sur les figurines postales. Dans ces images, c’est donc la première fois que les symboles fasciste et royal jouent le rôle qui est institutionnellement le leur : au cœur de chacune des figurines de droite, destinée au reçu du client, les “petites” armoiries anciennes, – comportant Croix blanche de Savoie, collier de la Très Sainte Annonciade, et couronne –, sont entourées latéralement tantôt de deux faisceaux du licteur (sur le premier des sous-types, fig. 5 et 6), tantôt sur leur côté gauche d’un seul faisceau du licteur (sur le second des sous-types, fig. 7 et 8). Placée un peu plus haut (émission de 1926-1930) ou placée un peu plus bas (émission de 1936) dans l’axe vertical des verges, la lame de la hache est tournée vers les symboles royaux ; mais, séparée des symboles royaux par la composition des rubans et des branches, elle n’a pas ici l’air menaçant. |
Voici un exemple d’utilisation de cette émission : reçu pour l’expéditeur concernant l’assurance « pour deux mille lires » d’un « paquet, valeur n° 470, envoyé à Milan, à l’attention de l’Établissement C. Paralotti [ ?] » avec quatre bandes de dix timbres Assicurativi Postelegrafonici (valeur faciale de 3 lires, figurine de couleur gris-olive : fig. 9), au départ d’Agropoli (province de Salerne), le 28.5.47. C’est l’année limite de la validité légale des figurines émises en 1936.
fig 9: Paquet assuré avec 4 bandes de 10 timbres Assicurativi Postelegrafonici -3 lires gris olive-, d'Agropoli (salerno) en date du 28.5.1947. En dessou, le timbre utilisé.
D’autres exemples d'utilisation sont donnés ci-après:
1) Reçu pour un paquet oblitéré à Trieste le 5/9/1936, timbre assicurativi avec taxe 1,50 (bleu) et 0,50 (rouge) lires + colis postaux 3 lires.
2) Accusé de réception de Maja Bassa Bolzano, oblitéré le 1/12/1927, pour Philadelphie, USA, taxe 3 lires.
3) Reçu pour un paquet oblitéré de Gattaiola-Lucca, le 6/5/1932. Taxe 1 et 2 lires.
4) Lettre recommandée avec affranchissement d'émergence, depuis Millesimo-Savona, du 4/7/1944 composé de 2 sections x 2 d'1 lire +RSI de 25 cm.